En témoigne la découverte, en 1991, de l'homme de Similaun à la surface d'un glacier des Alpes de l'Otztal à la frontière entre l'Italie et l'Autriche.
Les raisons de ces incursions ou de ces occupations temporaires ont été très variées : chasse, cueillette, commerce et contrebande, élevage, guerres, persécutions ou adorations religieuses, prospection de cristaux de quartz, exploitation de filons d'ardoises...
Et si les raisons de l'escalade de falaises abruptes rapportées par la littérature grecque ou romaine restent obscures, elles ont bel et bien existées.
Il va de soi que bien des ascensions n'ont jamais été connues, que de nombreuses premières ont été tues, que nombre d'alpinistes avant la lettre ont été oubliés.
Pour les prouesses les plus anciennes, contentons-nous, par force, de celles qui ont été les plus médiatisées à leurs époques :
Pierre III d'Aragon gravit le Canigou qui était alors considéré comme la plus haute cime de son royaume, ou du moins celle qui était la plus visible de loin.
Pétrarque, un poète italien, accède au sommet du Mont Ventoux et fait de son ascension un récit inégalé.
Au cours du même siècle, Léonard de Vinci effectue l'ascension à caractère scientifique du Monte-Bo (Alpes-Maritimes) et Boniface Rotario d'Asti, en 1358, expie ses péchés au sommet du Rochemelon (3557 m). Certains des grands moteurs de l'essor de l'alpinisme sont en place : l'esthétique, le scientifique, le religieux.
Avec Antoine de Ville qui se hisse au sommet du Mont Aiguille (2085 m) naît l'alpinisme sportif qui emprunte ses moyens guerriers aux techniques d'assaut des châteaux forts : échelles, grappins, cordes...
L'argent devient une autre des motivations présidant à la conquête des montagnes. La forte récompense promise par Horace-Bénédict de Saussure motive Michel Paccard et Jacques Balmat qui réussissent la première ascension du mont Blanc après bien des tentatives.
Le sommet du Cervin (4478 m) est atteint. Le drame qui survient lors de la descente coûte la vie à quatre des vainqueurs. Seuls Edward Whymper, le guide Peter Taugwalder et son fils rejoignent la vallée, sauvés par la rupture de la corde.
La Meije, dernier sommet invaincu des Alpes, est gravie par Emmanuel Boileau de Castelnau accompagné des Gaspard père et fils.
Pyramide provocante dominant Chamonix, le Petit Dru tombe dans l'escarcelle de Jean Charlet-Straton accompagné de Prosper Payot et Frédéric Folliguet.
Lors de la troisième expédition britannique au mont Everest les alpinistes George Leigh Mallory et Andrew Irvine disparaissent à plus de 8200 m d'altitude. Rien ne permet de savoir s'ils sont parvenus au sommet.
Après une randonnée à vélo depuis Munich, les frères Schmidt signent la première de la face nord du Cervin.
Laurent Grivel, forgeron à Courmayeur, rajoute des pointes à l'avant des crampons traditionnels. Mais l'utilisation systématique de cette innovation ne se fera que bien plus tard.
Pierre Allain invente le chausson d'escalade à semelle lisse et ouvre, avec Raymond Leininger, la face nord du Petit Dru (31 juillet - 1 août).
Ascension du Gasherbrum 8 068 m (karakorum - Himalaya). Sommet dit aussi Hidden Peak : 1re expédition française en Himalaya. Altitude atteinte 7 000m sur un itinéraire technique pour l'époque.
Après bien des tâtonnements, Vitale Bramani met au point la semelle en caoutchouc Vibram qui s'imposera rapidement.
Sous le signe du fascisme, les Allemands Anderl Heckmair et Ludwig Vörg et les Autrichiens Heinrich Harrer et Fritz Kasparek gravissent la face nord de l'Eiger qui est alors considérée comme "le plus grand problème des Alpes".
Ricardo Cassin, Luigi Esposito et Ugo Tizzoni se dressent au sommet des Grandes Jorasses après avoir parcouru avec aisance l'éperon de la pointe Walker en face nord.
Annapurna (Népal). Un premier sommet de plus de 8000 m est gravi par Maurice Herzog et Louis Lachenal. C'est la revanche de la France et sa renaissance après la Seconde Guerre Mondiale.
Mont Everest, Chomolungma en tibétain ou Sagarmatha en népalais : le toit du monde (8848 m) est atteint par Edmund Hillary et son sherpa népalais Tensing Norgay.
Plus novateur, seul et sans oxygène, Hermann Buhl parvient au sommet du Nanga Parbat (8125 m).
Aconcagua, 6 959 m (Argentine) : La très raide paroi Sud de l'Aconcagua, ne fut grimpée qu'en 1954 par une équipe de six jeunes Français, Dagory, Denis, Lesueur, Paragot, Poulet et Bérardini. Les conditions climatiques sont à l'origine des nombreuses gelures que les membres du groupe ont eu.
Le très difficile K2 ou mont Godwin-Austen (8611 m), deuxième sommet de la planète, révèle Achille Compagnoni et Lino Lacedelli. Walter Bonatti, jeune alpiniste sacrifié et calomnié lors de cette ascension, rétablira la vérité en 1993.
Par l'ouverture du pilier sud-ouest des Drus lors d'une ascension solitaire de six jours, créant la voie mythique du Pilier Bonatti, défiguré par le grand éboulement des Drus de 2005.
Makalu, 8 463 m (Népal) : 1re ascension par Lionel Terray et Jean Couzy le 15 mai lors d'une expédition française menée par Jean Franco sur la face nord et l'arête nord-est. Le lendemain les trois autres membres atteignent le sommet. Une grande réussite sur le 5e plus grand sommet du globe.
Tour du Muztagh : Très haut sommet rocheux qui culmine à 7273 m. 1re ascension par John Hartog, Joe Brown, Tom Patey et Ian McNaught Davis du côté ouest, une expédition britanique. 2e ascension par une expédition française (A. Contamine, P. Keller, Guido Magnone et Robert Paragot) qui atteint le sommet par le versant Est, cinq jours après. Chaque expédition ignorait la présence de l'autre jusqu'à ce que la cordée française aperçoive la cordée britannique au sommet.
Dans les derniers jours de 1956, la tragédie vécue par les jeunes alpinistes Jean Vincendon et François Henry émeut la France entière. Face à la désorganisation des secours alors bénévoles, l'État prend les choses en main mais hésite à dégarnir le front algérien de ses hélicoptères les plus récents.
Un exemple de l'apogée de l'escalade en ligne droite et artificielle : en six jours, René Demaison et Pierre Mazaud viennent à bout des 500 m de la directissime à la Cima ouest di Lavaredo (Dolomites), voie ouverte en hommage à Jean Couzy.
Jannu, 7 710 m (Népal) : Un sommet qui marque par sa difficulté. 1re ascension par Robert Paragot, Paul Keller, René Desmaison, et le Sherpa Gyalzen Mitchu, suivis le lendemain par Jean Ravier, Lionel Terray, et le Sherpa Wangdi. En 1959, une équipe française, dirigée par Jean Franco, fait une tentative qui les mène au camp 6 jusqu'à 7350 m, mais un peu au-dessus de ce camp, ils sont arrêtés par la difficulté des passages de glace. En 1962, une nouvelle équipe encore plus forte dirigée par Lionel Terray revient avec l'espoir de terminer la voie.
Apparition d'une nouvelle discipline : la descente de pentes raides et de couloirs à ski. Sylvain Saudan vire en sautant dans le couloir Spencer à l'Aiguille de Blaitière (23 septembre) : c'est le début de la médiatisation.
Toujours en dix pointes, taillant des marches et dans la tempête, René Demaison et Robert Flematti remontent le Linceul aux Grandes Jorasses. Seul signe d'innovation, ils ont emporté des talkies-walkies pour communiquer avec les médias.
La modernité des mauvais élèves : Claude Jager et Walter Cecchinel remontent le couloir nord-est des Drus en cramponnage frontal et "piolet traction". Des pentes de 70° sont atteintes. Armand Charlet décèdera en 1975.
L'alpiniste italien Reinhold Messner qui s'est fait connaître en 1975 en publiant "Le 7e degré" atteint le sommet de l'Everest seul et sans oxygène.
Un émule de R. Messner, Christophe Profit dégage un peu plus de trois heures dans son emploi du temps pour gravir en solo intégral la Directe Américaine aux Drus.
Reinhold Messner, toujours lui, est le premier à avoir gravi les quatorze sommets de plus de 8000 m.
La vitesse gagne la glace - au cours d'un enchaînement de dix faces nord dans les Alpes, Jean-Christophe Lafaille avale le Linceul en deux heures.
Le Linceul est presque entièrement descendu en surf et à ski par Sam Beaugey et Jérôme Ruby.
Patrick Berhault mène à bien sa traversée au long cours des Alpes, de la Slovénie à Nice en gravissant les principaux sommets.
Chomo-lonzo, 7540 m : Réalisation de trois itinéraires de grande difficultés (entre TD et ED) lors d'une expédition française. Dans des conditions parfois extrêmes : 1re du sommet N (7199 m) et du sommet Central (7540 m) par Yannick Graziani, Christian Trommsdorffet Patrick Wagnon. Ainsi que la 1re de la face Ouest, toujours sur le sommet Nord, par Stéphane Benoist et Patrice Glairon-Rappaz.
François Bon et Antoine Montant réalisent la première descente de l'Eiger en speed riding (ski et parapente) d'abord sur la face ouest puis en face nord.
Battant ses propres records les uns après les autres sur la face nord de l'Eiger, l'alpiniste suisse Ueli Steck enlève les 1600 mètres de cette paroi en 2 heures et 47 minutes et 33 secondes.
Sur les 1000 m et 31 longueurs de la voie du Nose au Capitan, on se bat à coup de minutes, parfois de secondes pour établir le record de l'ascension la plus rapide. À ce jeu là, Yuji Hiramaya et Hans Florine mènent en 2 heures 37 minutes et 05 secondes. Un record hors de portée des frères Huber (2h 45min 45s en octobre 2007) !
Ueli Steck parcourt la face nord du Cervin (voie Schmid) en 1 heure et 56 minutes.